16/10/2003
Dieu sur Terre
A l'instar d'un roi fantoche, il vient de célébrer
ses 25 ans de règne. Les hommages se multiplient, illustrés
par des rétrospectives de son parcours, sans oublier de souligner
l'admiration qui s'impose face à la persévérance
de ses fonctions malgré la maladie. Perdu sous l'épaisse
couche de révérences, son discours et son idéologie
sont oubliés. Si un politicien devient l'écho de la parole
papale, condamnant l'usage du préservatif, considérant la
sexualité comme un acte de procréation, rejetant l'homosexualité,
il est défini à raison comme un conservateur ou un réactionnaire.
Mais lorsque ce discours irresponsable et archaïque est prononcé
par un vieillard qui prétend représenter dieu sur terre,
on s'incline devant la sainteté de son rang, sans autre raison
que la tradition qui dicte qu'un pape est un homme vertueux.
Le parallèle avec la politique n'est pas innocent, et si sa dégénérescence
ne suffit pas à le pousser à abandonner son trône,
c'est que seul son titre lui garanti une existence parmi les hommes.
Mon discours est irrespectueux, mais je me demande quel degré de
naïveté, de crédulité, et de faiblesse morale
il faut posséder pour accorder sa confiance et son adoration au
représentant d'une institution aussi dissociée de son époque,
qui prône la générosité depuis un palais de
richesse, qui parle d'amour avec des critères de normalité,
qui incite à l'humilité en foulant les tapis rouges, qui
favorise l'expansion d'une maladie au nom de la sauvegarde de la morale,
qui nie la sexualité de ses représentants, et qui interdit
aux femmes l'accès à sa hiérarchie quasi militaire.
Qui osera enfin dire qu'il est un frein à l'évolution des
mentalités et à la prise en compte des réalités
contemporaines?
Si j'avais un soupçon de foi, je trouverais dieu bien cynique ou
passif pour permettre à un tel homme de le représenter,
et adresserais une prière pour que son successeur soit lucide et
vive dans le même monde que nous.
10/10/2003
Fumer de la mauvaise herbe nuit gravement à
la tolérance
A l'évocation de la Jamaïque, j'imagine vaguement
Bob Marley sur une plage avec une bande de potes,
une guitare, et un joint de pro qui tourne, cliché entretenu par
mon ignorance complète sur cette île et son histoire.
La lecture d'un tel article
ne peut que rappeler que toute institution a droit à sa petite
chasse aux sorcières, et que si la morale populaire suit le mouvement,
on peut presque transformer un génocide en purification. Si la
loi est ainsi faite, cela ne peut qu'imprimer une image de justice et
de légitimité dans le conditionnement collectif.
En rangeant dans un placard cette image fausse et
caricaturale que j'avais de la Jamaïque, j'ai aussi repensé
à ce jour, quand j'ai appris que la Suisse n'était pas seulement
le pays du chocolat et des montres, mais celui d'un état aux lois
rigides qui blanchissait l'argent des narcotraficants.
09/10/2003
Réactivité
Je constate avec du recul que mon blog prend un tournure relativement
polémique et politisée, ne sachant pas trop si c'est mon
regard qui perd de sa naïveté, ou une dégradation qui
pousse à la dénonciation et l'inquiétude.
Je vais tenter d'y voir une preuve de mon existence. Je réagis,
donc je suis...
08/10/2003
Vox Populi
A en juger les derniers sondages, on pourrait presque croire
que la population Française vient de se (re)découvrir une
passion pour le vote, à moins que ce ne soit la perte massive de
cartes d'électeurs qui pourrait justifier l'accidentel taux d'abstention
aux élections des dernières décennies. C'est peut-être
l'illusion de participer activement à l'acheminement vers un monde
meilleur qui pousse 74% de la population à réclamer un référendum
sur la constitution européenne, alors que parmi eux, on peut certainement
compter des amateurs de pêche le jour où il faut choisir
un président ou un député.
Mais là ou ce chiffre devient une véritable énigme,
c'est que je ne suis pas sûr que 74% de la population sache vraiment
ce qu'est une constitution, et je suis certain que seule une petite fraction
peut définir les tenants et les aboutissants d'une telle décision.
Personne n'aurait donc tiré de leçon du référendum
sur le traité de Maastricht? L'Europe nous était présentée
comme une belle union, l'explosion des frontières, la naissance
d'une grande nation, le drapeau aux étoiles qui rivalisera avec
outre-atlantique, la renaissance d'un vieux continent, la fête sans
frontière. Et soyons honnêtes, en dehors de quelques nationalistes,
nous y avons tous cru, ancrés dans nos fantasmes d'unicité.
La réalité n'a été que plus douloureuse dans
le constat que cet immense chantier n'avait été abordé
que sur le plan économique. Un grand club de marchands assez peu
conscients qu'une population est constituée d'êtres humains,
et dont l'obsession semble d'éradiquer tous les obstacles vers
une libéralisation forcée, et de légitimer les moyens
mis en oeuvre pour atteindre des objectifs chiffrés.
Dans cette euphorie de nouveauté, il était bien difficile
de prévoir ce qui allait sortir de cette union, au même titre
qu'il est bien hasardeux de prédire les conséquences d'une
éventuelle constitution commune. Pour ma part, j'en suis bien incapable.
Alors pourquoi demander un référendum alors que nous sommes
totalement incompétents sur le sujet? Peut-être est-ce la
forme du vote qui séduit, par son côté radical affirmatif
ou négatif, excluant toute nuance ou condition, bien inscrit dans
la volonté binaire de s'identifier dans un camps, si humaine. Tout
le monde pourra s'en laver les mains et se réfugier derrière
un "c'est vous qui l'avez voulu", permettant tous les dérapages
et toutes les dérives, ainsi que l'explosion de mauvaise foi des
votants qui prétendront avoir été opposés
au projet devant leurs petits désagréments quotidiens.
Cette illusion de démocratie ne m'évoque rien d'autre qu'une
tétine enfoncée dans la bouche d'un bébé pour
qu'il ne braille plus. C'est tellement plus pratique que de lui changer
sa couche pleine.
05/10/2003
L'amnésie de Johnny
Si Patrick Topaloff avait ouvert une boite de nuit, on n'en aurait certainement
pas autant parlé que celle de Johnny. Grâce à un article
du monde, j'ai enfin pu comprendre le rôle essentiel que
pouvaient jouer les émissions de real TV, dans une société
saine remplie d'inaugurations de Clubs: La fabrication de VIP. En effet,
comme le stipule l'article, tout le monde est VIP. Cela semble la moindre
des choses: si vous êtes sans talent, un peu exhibitionniste et
avec une grande gueule, il suffit de passer à la télé
pour devenir quelqu'un, ce qui rend le remplissage d'une boite exclusivement
par des VIP beaucoup plus facile.
Comme toujours, je voue une admiration sans bornes aux déclarations
du plus lifté de nos rockeurs nationaux, qui atteint des sommets
en déclarant qu'il aime bien le monde de la nuit, car les gens
sont différents. Je suppose que s'il lui arrivait par hasard de
croiser un ouvrier qui fabrique une de ses Harleys, il le trouverait encore
plus "différent" que les clubers.
03/10/2003
Mémère à la maison
Il y a quelques années, j'aurais certainement laissé
passer l'épisode, ou j'aurais essayé d'expliquer les choses
avec calme et patience, voire même avec pédagogie. Mais face
à tant d'aveuglement, je n'ai pas pu simuler l'indifférence,
la compassion, pas plus que je n'ai pu cautionner ses inepties.
Ma copine F. a fait les frais de ma colère dès l'instant
ou elle avait décidé de me téléphoner pour
se plaindre, car son fils cadet ayant maintenant 3 ans, elle n'allait
plus toucher ses indemnités de congés parental. Partant
du principe que c'était un dû, et jamais consciente que c'était
un privilège, elle ne s'est jamais posé la question sur
la chance que représentait une telle subvention, mais avait plutôt
tendance à mettre en avant l'insuffisance de cette rémunération
pour rester à la maison et élever ses enfants. Elle avait
beau me rétorquer que certains pays d'Europe rémunéraient
à hauteur de 80% du salaire, cela ne constituait pas une légitimité,
mais seulement une preuve de politique nataliste. Toute son argumentation
reposait sur la réclamation de pouvoir choisir entre travailler
et rester chez elle pour s'occuper de ses enfants, sans réaliser
que ce choix elle l'avait, mais que sa requête était plutôt
d'avoir un salaire pour cela. Je n'ai pu m'empêcher de lui faire
remarquer que cela ne tenait qu'à elle, car cette politique était
dans le programme de certains partis politiques conservateurs d'extrême
droite. Mon illustration tombait d'autant plus à propos qu'elle
voyait là une solution pour diminuer le chômage, ce qui constitue
l'argument majeur de ces partis pour établir un salaire de mère
au foyer. Si la diminution (prétendue) du chômage doit passer
par un bond de 50 ans en arrière sur le plan social, je me trouverais
une fois de plus dans les rangs de la dénonciation du schéma
familial traditionnel.
Tout ça parce qu'elle ne voulait pas énoncer
clairement que ça lui crevait le coeur de reprendre le travail.
01/10/2003
Le Poème
Pornographe
Il
était sur la longue liste des livres de la rentrée qui retenaient
mon regard, mon attention, et mon envie sur les étalages de librairies.
Tout d'abord car l'aspect extérieur du livre a été
particulièrement soigné et réussi, mais aussi car
on peut y voir un petit diablotin, signature à la fois invariable
et toujours différente d'Au diable Vauvert, maison d'édition
que j'affectionne pour sa politique générale de publication
d'auteurs peu connus en France, de prise de risque face aux grandes machines
d'édition qui font office de Star Academy de la littérature,
et le choix de textes très souvent alternatifs et originaux. C'est
au tour de Michael Turner, auteur Canadien jamais publié en France
jusqu'ici.
Le titre est faussement racoleur, car l'univers de la pornographie n'est
abordé qu'après 300 pages de découverte de la sexualité
par un jeune garçon. Toujours sur un ton léger, humoristique
et dédramatisant, l'absence d'interdits, de contraintes, et la
rencontre de personnages hauts en couleur, vont entraîner le narrateur
dans l'univers de la pornographie, sans épargner les déviances
et les loups en manque d'opportunité. Ce ton léger est appuyé
par une impression de passivité du personnage qui semble ne rien
faire de particulier pour se retrouver dans des situations plus qu'embarrassantes,
et le cantonne à un rôle de spectateur de sa propre vie.
Lu avec beaucoup de plaisir. |